Conversations nocturnes [PV Michael]

En poussant la porte du Caritas, Cristina soupira de soulagement. Elle avait besoin d'un verre et d'anonymat, et sans une Meredith imbibée de tequila, elle était à peu près sûre de réussir à avoir les deux.
L'arrivée de son amie en ville avait déclenché de nouvelles angoisses et ni son travail ni ses différents avec House n'arrivaient à lui libérer l'esprit.

-Un double whisky, s'il vous plaît.

Elle était presque décidée à s'installer à une table mais le monde qui s'agitait dans la salle la rebuta. Elle fit signe au barman qu'elle allait rester au bar et commença à siroter sa boisson.
Meredith, Derek, Izzie, Alex... Owen... Les fantômes qu'elle avait quitté réapparaissaient dans sa vie sans qu'elle sache quoi leur dire ou quoi en attendre.
Elle soupira à nouveau et avala le contenu de son verre d'un seul trait. Si même les opérations à coeur ouvert ne lui faisait plus oublier ses problèmes, elle n'avait plus qu'à changer de métier. Changer de ville, elle avait essayé, pour le résultat qu'elle avait obtenu...

-Encore un, s'il vous plaît...

Elle avança un billet sur la table puis prit sa tête entre ses mains. Elle resta un instant dans cette position avant de sentir bouger le tabouret à côté d'elle. Le mouvement la fit réagir et elle reprit contenance. Elle vit le barman la regarder avec suspicion et elle récupéra sa monnaie en jetant un oeil à l'homme qui avait pris place à côté d'elle. Elle croisa son regard et retourna instantanément à son verre.

Michael avait réussi à dégoter des fringues, et même un peu d'argent. Il lui resté à trouver un endroit sympa pour poser pied à terre, mais tout cela, tout en évitant de croiser le moindre policier.
Alors qu'il airait dans les ruelles de Los Angeles il eut une idée. Quel meilleur endroit qu'un bar pour éviter ce genre de rencontre. La belle enseigne lumineuse affichait "Le Caritas".
Aprés une courte réflexion, décision était prise d'entrer et de dépenser le peu d'argent qu'il avait amassé en faisant la manche cette après-midi.
Autant le dépenser, et puis il n'avait pas assez pour une nuit d'hôtel.
Il y avait beaucoup de monde à l'intérieur, aussi Michael préféra opter pour le comptoir.
Une épaisse fumée occupait la salle et il était difficile, voir impossible de discerner les gens présents.

Il s'adressa au serveur :

-Un double whisky s'il vous plait, merci.

La fumée se dissipant, Michael distingua une femme à côté, qui semblait avoir commander la même chose que lui. Le bar était si sombre, qu'on pouvait à peine voir qu'il s'agissait d'une femme. Aprés un furtif regard, il se replongea dans son whisky qu'il descendit d'une traite

-La même chose s'il vous plaît. dit il en claquant son verre sur le comptoir.

La jeune fille installée à côté l'intriguait. Il ne pouvait pas dire pourquoi, tant il en avait peu vu. Toujours est il, que son regard était instinctivement attirée vers cette inconnue. Son regard croisa le sien, mais il n'y prêta pas attention. Depuis son évasion, il lui semblait que tout le monde l'observait, que tous les regards se tournaient vers lui. Alors certainement encore une feinte de son imagination.
Il se contenta de lui faire un timide sourire comme pour dire bonsoir.

Manifestement, la jeune femme n'était pas la seule a être intriguée par son voisin. Elle sentait son regard qui l'examinait et lorsqu'elle se retourna une nouvelle fois, prête à lui demander s'il voulait sa photo, son sourire la désarma. Elle jouait depuis trop longtemps le rôle de la fille distante et désagréable, ce soir, elle n'en avait pas la force.
Jetant un oeil sur son verre, elle constata qu'il buvait la même chose qu'elle, et à la même vitesse. Un sourire se dessina alors naturellement sur son visage.

-Vous avez quelque chose à fêter ? Ou à oublier peut-être, lui dit-elle en désignant les verres.
Se retournant vers le serveur, elle lui fit signe qu'il était temps de passer au service numéro 3. Contrairement à ses soirées avec Meredith où le but était de finir dans un état lamentable histoire de refaire le monde, quand elle était seule, l'alcool aidait Cristina à se mettre au point avec elle-même. Et dieu sait qu'il y avait du travail !

-La même chose pour vous aussi ? demanda-t-elle à son voisin.
Elle avait fait cette proposition spontanément, sans réfléchir aux conséquences ou à la façon dont elle pourrait être perçue, mais à voir comment ils étaient installés tous les deux, il y avait peu de risques qu'elle soit mal reçue !
La fumée commençait à se dissiper autour d'eux et elle distinguait mieux le visage de l'homme du tabouret d'à côté. Des yeux clairs, des traits fins et un sourire très doux. Quelque chose d'angélique, indubitablement.

Au fur et à mesure que la fumée disparaissait, elle laissé place au visage de la jeune femme. Michael découvrit alors un visage vraiment très agréable. Il comprit alors pourquoi il était si attiré par sa voisine de tabouret. C'était une belle asiatique, un vrai visage d'ange, mais à voir sa façon de descendre son verre, il ne fallait surtout pas se fier aux apparences.
C'est quand celle ci lui adressa un sourire, en réponse au sien, qu'il tomba encore un peu plus sous son charme.
Alors qu'il était perdu dans ses pensées, il en fût extrait par une douce voix, qui lui demandait si il fêter quelque chose, ou si il buvait pour oublier.

-Je veux oublier ce que je fête. répondit-il doucement.

Il fêtait en quelque sorte son évasion, et pourtant c'était de là que venait tous ses problèmes. Mais oublier ? Était-ce possible ? Il y aurait toujours quelque chose pour lui rappeler son lourd secret.

Quand elle lui demanda si il désirait la même chose, il répondit affirmativement, d'un simple signe de la tête.
Timide de nature, Michael était facilement impressionné par les inconnus, et d'autant plus lorsqu'il s'agissait d'une si jolie inconnue.
Bien qu'il avait répondu d'instinct, il analysait tout de même la question de la demoiselle.
Pourquoi lui proposait elle un verre, alors qu'elle ne le connaissait pas ?

Une chose était certain, il se devait de la remercier.
Il lui tendit sa main:

-Merci, la prochaine est pour moi.

Puis en la regardant dans les yeux, il ajouta :

-Moi c'est Michael.

En entendant la réponse que lui fit son voisin, Cristina émit un siflement d'admiration :

-Waow... Vous êtes encore plus barré que moi... Vous savez que vous auriez le droit de demander un prix pour ça ?

Elle l'avait laissé la dévisager sans ciller. Elle pouvait sentir sa timidité, peut-être même sa gêne, qui se confirma quand il accepta le verre qu'elle lui offrait. C'était une réaction que Cristina avait l'habitude de déclencher chez les inconnus, mais elle pouvait sentir qu'il y avait quelque chose de différent chez ce gars là. Il aurait pu refuser, mais il ne l'avait pas fait, il aurait pu couper court à la conversation, au lieu de quoi il venait de se présenter.
Elle se sentit soulagée. Non pas qu'elle ressentait le besoin de se trouver un compagnon de mal-être, mais elle était rassurée de pouvoir attirer autre chose que l'antipathie à chaque fois qu'elle se trouvait quelque part.
Et peut-être que le sourire décidément craquant du jeune homme y était pour quelque chose.

Elle lui tendit à son tour sa main et soutint son regard :

-Cristina... Et il risque d'y avoir pas mal de prochaines, alors je ne tenterais pas le diable si j'étais vous.

Faisant glisser le verre qui lui était destiné vers lui, elle attrapa ensuite le sien qu'elle leva dans sa direction.

-A... Ce que vous fêtez ... ou ce que vous oubliez ?

Tant il était plongé dans le regard de cette inconnue, qui l'était un peu moins, depuis qu'il connaissait son prénom, tant il se replongé dans ses pensées.
Il avait beau picoler pour tenter d'oublier, rien ne parvenait à effacer ses craintes. Qu'allait-il faire, qu'allait il devenir, où allait il passait la nuit ? Tant de questions sans réponse. Voilà à quoi penser vraiment Michael.
Il écoutait Cristina lui répondre, mais il agissait en automatisme, se laissant porter par le moment présent.

Et justement, il réfléchissait à ce qu'elle venait de lui dire. Plus barrée qu'elle ? Sans doute avait elle raison. En y pensant, il avait braqué une banque volontairement, pour se faire emprisonner et finalement s'évader. Il fallait à coup sur être sacrément barré!

-Sans doute... lança il en réponse.

Sentant sa timidité mise en avant, il se referma un petit peu sur lui, et repris cet air mystérieux, qui lui était en temps normal si caractéristique. Ce qu'il était en train de faire, ne lui correspondait vraiment pas. Entrer dans un bar, boire, et s'adresser à une femme qu'il ne connait pas, ce n'était pas du tout son genre.

-Buvez pour deux...

Michael qui n'avait pas l'habitude de boire, venait de descendre plusieurs whisky cul sec, et sa tête commençait à lui tourner. La fatigue de sa journée passée n'arrangeant pas l'affaire.
Il laissa le dernier verre posé au centre du comptoir. Le jeune homme se refermait lentement, et pourtant, il gardait son visage amical et souriant.

Cristina regarda le verre laissé au milieu du comptoir. Son esprit de chirurgien nota mentalement qu'il était placé à égale distance d'eux. Certaines auraient pris ça pour un signe, mais pas Cristina. Elle se contenta de hausser les épaules.

-Comme vous voulez.

L'alcool lui montait doucement -mais sûrement- à la tête. Après avoir avalé son troisième verre, elle constata que Michael, puisque c'était son prénom, n'était pas revenu sur sa décision et n'avait pas touché au whisky. Il semblait complètement absent et préoccupé par ses pensées, et il aurait pû être en un tout autre endroit, en toute autre compagnie, sans même le remarquer.
Sans vraiment savoir pourquoi, Cristina commença à se sentir irritée par sa présence à côté d'elle et par le sourire qu'il affichait en permanence.
Elle se tourna vers lui et l'apostropha un peu brutalement :

-Vous savez, en général, quand quelqu'un vous offre un verre, vous l'acceptez avec un sourire ou vous le refusez, toujours avec un sourire. On n'accepte pas un verre pour ensuite mieux le refuser. C'est... vexant.

Tout en parlant, Cristina comprit qu'enchaîner deux double whiskys cul sec après une garde sans pause pour déjeuner n'était pas la meilleure façon de se faire comprendre, et encore moins apprécier, d'un inconnu. L'alcool faisait maintenant complètement effet et elle s'entendit malmener le pauvre garçon qui n'avait rien demandé. Mais c'était trop tard, elle était lancée.

-Et puis franchement, boire pour "oublier ce que vous fêter"... Vous avez fait quoi, tué quelqu'un ? Parce que c'est ce que je fais tous les jours, et croyez-moi, on s'en remet !

Au point où elle en était, elle aurait certainement besoin d'un peu plus de courage pour poursuivre la conversation. Elle attrapa le quatrième whisky et l'avala... cul sec !